Article | 15 Mai, 2018

L'UICN recommande d’inscrire deux vastes territoires de peuples autochtones au patrimoine mondial

Deux très grandes aires du Canada et de la Colombie sont recommandées pour l’inscription sur la Liste du patrimoine mondial par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), conseillère officielle pour le patrimoine mondial naturel. Ces deux sites mettent en évidence le rôle important des peuples autochtones qui y vivent tout en prenant soin de la nature intacte et des processus écologiques. S'ils seront inscrits, ils feront partie des plus grands sites du patrimoine mondial de la planète.

La recommandation de l'UICN fait partie d'une première série de rapports publiés aujourd'hui par l'UNESCO pour le Comité du patrimoine mondial, qui prendra ses décisions lors de sa réunion du 24 juin au 4 juillet au Bahreïn. Des évaluations de propositions de nouveaux sites et des rapports de suivi sur l'état de conservation des sites inscrits y sont inclus. Une deuxième série de rapports sera publiée à la fin du mois de mai.

Pour 2018, l'UICN a évalué neuf propositions d'inscription sur la Liste du patrimoine mondial. Parmi sept évaluations publiées aujourd'hui, l'UICN a conclu que deux sites - Pimachiowin Aki au Canada et le parc national de Chiribiquete en Colombie répondent aux critères d'inscription en vertu de leurs valeurs naturelles. Tous deux sont proposés comme sites « mixtes » – à la fois naturels et culturels.

Le lien étroit entre l’humain et la nature

Depuis des millénaires, les deux sites que l’UICN recommande d’inscrire sont les territoires gardés par des peuples autochtones, dont la culture, les moyens de subsistance, l'identité et les systèmes de croyances sont liés aux paysages naturels.

Au Canada, Pimachiowin Aki comprend les terres ancestrales de quatre Premières Nations anishinaabe et trois aires protégées provinciales, qui s’étendent ensemble sur 2,9 millions d'hectares dans le Bouclier boréal canadien. Selon l'évaluation de l'UICN, ce site marque une nouvelle étape pour les propositions d’inscription car, dans ce cas, les peuples autochtones ont fait preuve de leadership et d'un engagement remarquables afin de protéger leurs territoires à travers la Convention du patrimoine mondial.

Le paysage reflète le lien profondément interconnecté entre l’humain et la terre qui s’est tissé sur  7’000 ans. Les valeurs naturelles de Pimachiowin Aki, qui signifie « la terre qui donne la vie », sont façonnées par cette longue histoire d'interaction. La terre, l'eau et d’autres ressources naturelles ont été gouvernées et gérées collectivement pendant cette période. Par exemple, l'utilisation du feu pour ouvrir la canopée de la forêt et favoriser certaines ressources, la manipulation des cours d'eau, la chasse, la pêche et le piégeage traditionnels ont tous influencé les processus naturels du site.

L’ampleur, l'intégrité et la diversité des écosystèmes de Pimachiowin Aki soutiennent des espèces boréales caractéristiques comme le caribou des bois, classé Vulnérable par la Liste rouge de l'UICN des espèces menacées™, l'élan, le loup, la grenouille léopard et la paruline du Canada.

Le parc national de Chiribiquete – « La Maloca du jaguar » est le plus grand parc national de Colombie, couvrant près de 2,8 millions d'hectares. Situé dans l'Amazonie centrale colombienne, ce site est considéré comme l'une des aires protégées les plus irremplaçables au monde pour la conservation des mammifères, des oiseaux et des amphibiens.

Pour les communautés autochtones, y compris des groupes vivant volontairement isolés dans des parties inaccessibles du parc, Chiribiquete est une grande maison ancestrale (ou « maloca ») pour le jaguar. La survie de l'espèce est donc aussi importante pour les croyances culturelles que pour la bonne conservation de la biodiversité. Le parc abrite également une faune emblématique comme le puma, le dauphin rose et le tapir terrestre, dont le statut est Vulnérable.

Le parc national de Chiribiquete avait déjà été proposé pour l’inscription en 2004, mais des problèmes de sécurité avaient rendu son évaluation irréalisable. Le processus de paix actuel en Colombie a abouti à l'arrêt des conflits armés, renforçant ainsi la protection du parc.

Les merveilles naturelles menacées

Les recommandations publiées aujourd'hui comprennent également des rapports de suivi sur l'état de conservation des sites inscrits au patrimoine mondial. L'UICN surveille chaque année entre 55 et 60 sites naturels, en collaboration avec le Centre du patrimoine mondial de l'UNESCO. Trente-sept de ces rapports sont maintenant accessibles au public et 20 autres seront publiés dans deux semaines.

Les rapports montrent que, malgré leur statut international de haut niveau, les sites naturels du patrimoine mondial continuent à faire face à de fortes pressions, engendrées notamment par les infrastructures, les espèces envahissantes, les changements climatiques, le tourisme non durable et le braconnage.

Les sites surveillés comprennent des lieux emblématiques tels que les chutes d'Iguazu / Iguaçu en Argentine et au Brésil, le lac Baïkal en Russie et le delta de l'Okavango au Botswana.

Tous les rapports et évaluations de l'UICN peuvent être consultés sur www.iucn.org/42whc.