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Communiqué de presse 27 Mar, 2025

Les 1 000 premiers fonges de la Liste rouge de l’UICN révèlent des menaces croissantes - Liste rouge de l’UICN

Gland, Suisse, 27 mars 2025 (UICN) - Le nombre d’espèces de champignons figurant sur la Liste rouge de l’UICN des espèces menacées™ a dépassé 1 000 taxons, confirmant que la déforestation, l’expansion agricole et le développement urbain entraînent un déclin de ces espèces dans le monde entier. La mise à jour d’aujourd’hui révèle également que les arbres à encens font face à un risque croissant d’extinction, et de nouvelles évaluations du Statut vert montrent l’impact positif de la conservation sur des espèces comme le lion.

La Liste rouge de l’UICN comprend désormais 169 420 espèces, dont 47 187 menacées d’extinction. L’ajout de 482 espèces de fonges nouvellement évaluées porte leur nombre sur la Liste rouge de l’UICN à 1 300 taxons, dont au moins 411 sont menacées d’extinction.

« Les fonges sont les héros méconnus de la vie sur Terre : ils constituent le fondement même d’écosystèmes sains, mais ils ont longtemps été négligés. Grâce au dévouement d’experts et de citoyens scientifiques, nous avons franchi une étape essentielle : plus de 1 000 des 155 00 espèces fongiques connues dans le monde ont désormais été évaluées pour la Liste rouge de l’UICN des espèces menacées qui reste la source d’information la plus complète sur le risque d’extinction. L’heure est maintenant venue de transformer ces connaissances en action et de sauvegarder l’extraordinaire règne fongique, dont les vastes réseaux souterrains soutiennent la nature et la vie telles que nous les connaissons », a déclaré la Dr Grethel Aguilar, Directrice générale de l’UICN.

La croissance rapide des zones agricoles et urbaines a entraîné la destruction des habitats des fonges, mettant en danger d’extinction 279 espèces. Les ruissellements d’azote et d’ammoniac issus des engrais et de la pollution des moteurs constituent également une menace pour 91 espèces. Ces menaces sont particulièrement importantes en Europe, affectant des espèces traditionnellement bien connues dans les campagnes telles que l’Hygrocybe intermedia, classée comme « Vulnérable ».

Au moins 198 espèces de fonges sont menacées d’extinction en raison de la déforestation pour la production de bois, de l’exploitation forestière illégale et du défrichement pour l’agriculture. La coupe à blanc de forêts anciennes est particulièrement dévastatrice , détruisant les fonges qui n’ont pas le temps de se régénérer dans les cycles de foresterie par rotation   Depuis 1975 , 30%  des vieilles forêts de pins en Finlande, en Suède et en Russie ont été abattues poussant des espèces telles que le tricholome colosse (Tricholoma colossus) vers la catégorie « Vulnérable ».

Les changements climatiques ont un impact sur les fonges. Plus de 50 espèces sont menacées d’extinction en raison de changements dans les modèles de feu aux États-Unis, qui ont radicalement changé les forêts. Les sapins se sont étendus jusqu’à dominer les hautes forêts de montagne de la Sierra Nevada depuis 1980, réduisant ainsi l’habitat de Gastroboletus citrinobrunneus, désormais classé « En danger ».

« Bien que les fonges vivent principalement cachés sous terre et à l’intérieur du bois, leur perte a un impact sur la vie au-dessus du sol, tributaire de ceux-ci. Lorsque nous perdons des fonges, nous appauvrissons les services écosystémiques et la résilience qu’ils fournissent, d’une résistance à la sécheresse et aux agents pathogènes dans les cultures et les arbres au stockage de carbone dans les sols », a déclaré le Professeur Anders Dahlberg, coordinateur de l’autorité de la Liste rouge du Groupe de spécialistes des champignons, polypores et vesses de la CSE-UICN. « Il est important que davantage de forêts anciennes soient protégées. Les pratiques forestières devraient tenir compte des fonges, par exemple en laissant du bois mort et des arbres éparpillés, et une gestion proactive des forêts peut aider à mieux gérer l’intensité des incendies ».

Les fonges constituent leur propre règne, distinct de celui des animaux ou des plantes. C’est le deuxième plus grand règne après les animaux, avec environ 2,5 millions d’espèces, dont environ 155 000 sont actuellement décrites. Ils sous-tendent tous les écosystèmes : la plupart des plantes s’associent à des fonges pour absorber les nutriments et ne peuvent donc pas exister sans eux, et les fonges rendent également possible la décomposition. Beaucoup sont comestibles, utilisés dans la production d’aliments et de boissons, y compris la fermentation, constituent la base de médicaments et soutiennent les efforts de biorestauration visant à nettoyer les sites contaminés.

L’action locale détient des solutions pour éviter l’extinction des arbres à encens

La mise à jour d’aujourd’hui révèle que cinq espèces d’arbres à encens (Boswellia) sur l’île de Socotra, au Yémen, sont passées de la catégorie « Vulnérable » à « En danger », une espèce est passée de la catégorie « Vulnérable » à la catégorie « En danger critique », et que trois espèces ont été évaluées pour la première fois comme « En danger critique ». Les jeunes pousses sont broutées par les chèvres et ont du mal à s’épanouir lors de sécheresses prolongées. Bien que les chèvres soient traditionnellement liées à l’élevage à Socotra depuis des milliers d’années, le déclin du pâturage rotatif traditionnel et la taille croissante des troupeaux au cours du siècle dernier ont accru la pression de recherche de nourriture. Des cyclones, des crues soudaines et des glissements de terrain plus fréquents et plus intenses, comme ceux observés en 2015 et 2018, ont endommagé et déraciné de nombreux arbres.

« Les arbres à encens sont très importants pour notre culture à Socotra, qui abrite la plus grande diversité au monde d’espèces d’arbres à encens par kilomètre carré. En construisant des protections autour des jeunes arbres, les communautés locales peuvent les protéger des chèvres et produire du miel d’arbre à encens pour des revenus supplémentaires. Alors que des conditions météorologiques extrêmes frappent l’île, une action locale est essentielle pour assurer l’avenir des arbres à encens de Socotra », a déclaré M. Mohammed Amer, expert local en Boswellia qui a contribué aux évaluations de la Liste rouge et gère le projet de conservation de ces arbres à Socotra.

L’un des produits les plus précieux du monde antique, l’utilisation de l’encens, est aujourd’hui bien gérée sur Socotra. Les peuples autochtones utilisent la résine et l’écorce, par exemple dans la médecine traditionnelle et les pratiques religieuses. Il est essentiel que l’utilisation de l’encens de Socotra reste locale et proportionnée à la rareté des arbres.

Le Statut vert montre que le lion a besoin d’efforts de conservation plus intenses

La Liste rouge de l’UICN inclut désormais plus de 100 évaluations du Statut vert des espèces. Ce dernier complète la Liste rouge en offrant un outil permettant d’évaluer le rétablissement des espèces et de mesurer les succès en matière de conservation. La première évaluation du Statut vert du lion (Panthera leo) montre que les populations de l’espèce sont fortement réduites, même si l’espèce se maintien dans la catégorie « Vulnérable » sur la Liste rouge de l’UICN. L’évaluation actuelle du Statut vert montre que les impacts humains empêchent le lion de retrouver une pleine résilience écologique sur l’ensemble de son aire de répartition, avec des déclins importants dans de vastes zones, et son extinction en Afrique du Nord et en Asie du Sud-Ouest. Cependant, l'évaluation montre également que les efforts de conservation ont permis d’éviter des extinctions probables l’ouest et le sud de l’Afrique centrale, en Afrique du Sud et en Inde. Des efforts accrus sont nécessaires pour maintenir la population existante, à mesure que les établissements humains dans son aire de répartition continuent de croître.

Citations de référence :

« Les arbres à encens symbolisent le caractère unique de la biodiversité de Socotra et le statut de l’île en tant que site du Patrimoine mondial. Cependant, comme beaucoup d’autres à travers le monde, ces arbres emblématiques font face à plusieurs menaces, en particulier à cause du bétail. Depuis 2020, la Fondation Franklinia soutient le travail sur le terrain de personnes locales dévouées à partir de plusieurs approches pour protéger les semis. Ce n’est pas une bonne nouvelle de voir que la situation ne cesse de se détériorer. Pour sauver ces espèces, il est urgent de réduire les impacts du pâturage et de se concentrer sur des pratiques de durables traditionnelles. C’est probablement la seule façon pour que les enfants de Socotra puissent continuer à profiter de leur patrimoine naturel unique », a déclaré Jean-Christophe Vié, Directeur général de la Fondation Franklinia, qui a soutenu les évaluations de la Liste rouge du genre Boswellia, ainsi que les mesures de conservation de ces espèces.

« Les fonges sont une partie vitale mais souvent invisible de la biodiversité, soutenant les écosystèmes d’une manière que nous commençons à peine à comprendre. L’ajout de 1 000 espèces fongiques à la Liste rouge de l’UICN souligne leur importance et les menaces urgentes auxquelles elles sont confrontées. Avec de meilleures données, nous pourrons prendre des mesures significatives pour protéger les fonges et assurer ainsi la santé des plantes, des animaux et des écosystèmes qui en dépendent », a déclaré la Dr Anne Bowser, Directrice générale de NatureServe.

« Il est encourageant que plus de 100 évaluations du Statut vert des espèces de l’UICN aient été publiées seulement trois ans après son introduction en tant que nouvelle norme mondiale, et que des centaines d’autres soient en préparation. L’exemple du lion démontre le pouvoir que les données supplémentaires du Statut vert fournissent, étant donné que nous disposons maintenant de données sur les endroits où une extinction locale a probablement été évitée grâce aux efforts de conservation, ce qui pourra aider pour de futures stratégies de protection et de récupération de l’espèce », a déclaré le Dr Barney Long, Directeur principal des stratégies de conservation à Re:Wild.

« Les mycologues de Kew célèbrent l’accent mis sur les fonges dans la dernière mise à jour de la Liste rouge de l’UICN. Cette augmentation de la représentation des fonges sur la Liste rouge résulte de nombreuses années de travail collaboratif dans le renforcement des capacités de la communauté mycologique à mener des évaluations fongiques. Kew contribue à cet effort mondial en évaluant les espèces et en développant des outils pour accélérer la Liste rouge des fonges. D’autres évaluations sont nécessaires de toute urgence dans tous les groupes de fonges, afin d’identifier et d’atténuer les risques d’extinction auxquels ceux-ci sont confrontés », a déclaré Susana Cunha, Doctorante travaillant sur la conservation des fonges aux Jardins botaniques royaux Kew.