Les agriculteurs pourraient augmenter considérablement leur productivité en conservant la biodiversité des sols - Rapport de l’UICN
Gland, Suisse, 8 septembre (UICN) – En augmentant la biodiversité des sols grâce à des pratiques durables, les agriculteurs pourraient contribuer de façon substantielle à la sécurité alimentaire et hydrique, ainsi qu’à l’atténuation et l’adaptation aux changements climatiques, selon un nouveau rapport de l’UICN publié aujourd’hui. Une augmentation annuelle de seulement 0,4% de la teneur en carbone des sols agricoles (un indicateur clé de la biodiversité des sols) au cours des 30 prochaines années pourrait potentiellement stimuler la production mondiale de trois grandes cultures, maïs, blé et riz, jusqu’à 23,4%, 22,9% et 41,9% par an respectivement, selon le rapport.
« Les données de ce rapport démystifient l’idée selon laquelle la conservation de la nature et la production alimentaire mondiale sont un jeu à somme nulle », a déclaré le Dr Bruno Oberle, Directeur général de l’UICN. « L’agriculture a souvent été présentée comme une menace pour la conservation de la biodiversité. Pourtant, la conservation de sols et de paysages vivants et riches en biodiversité peut stimuler les rendements, tout en aidant à la fois la nature et la société. Ce rapport identifie clairement un terrain d’entente et des objectifs communs pour les agriculteurs et les défenseurs de l’environnement, susceptibles de contribuer à assurer l’avenir de l’agriculture elle-même. »
Le nouveau rapport « Notre terrain d’entente : rétablir la santé des terres pour une agriculture durable » quantifie pour la première fois les avantages sociétaux et la valeur monétaire potentiels d’une adoption mondiale, à grande échelle, de méthodes d’agriculture durable rentables, qui stimulent la matière organique et la biodiversité des sols. Ces méthodes comprennent l’agroforesterie et l’agriculture de conservation, ainsi que l’utilisation de fumier et le paillage.
Les augmentations potentielles de rendement pour le maïs, le blé et le riz sont estimées à 132 milliards de dollars américains. En outre, l’augmentation de la teneur en carbone organique des sols agricoles dans le monde augmenterait leur capacité à stocker l’eau jusqu’à 37 milliards de m3, réduisant ainsi les besoins d’irrigation d’environ 4% à l’échelle mondiale, et permettant une économie potentielle de 44 milliards de dollars américains par an, selon le rapport.
En séquestrant du carbone, les sols riches en biodiversité contribuent également à atténuer le réchauffement climatique. Le rapport estime qu’une augmentation annuelle de 0,4% de la teneur en carbone des sols se traduirait par une séquestration de 1 GtC supplémentaire par an en moyenne, soit 10% des émissions mondiales de carbone d’origine humaine sur la base des chiffres de 2017. Cette contribution à l’atténuation des changements climatiques permettrait à la société d’économiser environ 600 milliards de dollars américains par an en valeur actuelle sur la période 2020-2050, selon le rapport.
« Ce rapport montre qu’en travaillant ensemble, agriculteurs et défenseurs de l’environnement peuvent assurer une sécurité alimentaire, nutritionnelle et hydrique à long terme, pour tous. Des sols et des paysages sains et vivants peuvent en effet accroître la résilience de la production alimentaire aux impacts négatifs des changements climatiques et garantir l’accès à des aliments sains et nutritifs, en particulier pour les personnes les plus vulnérables dans les pays en développement », a déclaré Ludovic Larbodière, Expert principal en agriculture et environnement à l’UICN. « Pour réaliser cette vision, nous devons cesser de penser à l’agriculture uniquement en termes de nourriture, de fibres et de combustibles, et plutôt encourager et récompenser ces services supplémentaires que les agriculteurs fournissent à la société. »
Les calculs du nouveau rapport de l’UICN sont basés sur une augmentation annuelle supposée de la teneur en carbone des sols agricoles de 0,4% entre 2020 et 2050. Cette augmentation a été fixée comme objectif par l’initiative 4 pour 1000, lancée par le gouvernement français en 2015. Selon une étude récente, cet objectif est réalisable grâce à une adoption à grande échelle de pratiques durables.
Le rapport expose les mesures concrètes que les agriculteurs, les décideurs, les organismes gouvernementaux et les entreprises privées peuvent prendre pour favoriser une transition mondiale vers une agriculture durable. Le rapport appelle à une utilisation plus vaste des approches agro-écologiques et exhorte le secteur agricole à adopter des objectifs ambitieux en matière de santé des terres. Il appelle également à des objectifs nationaux et mondiaux visant à obtenir un impact positif net de l’agriculture sur les indicateurs clés de biodiversité d’ici 2030. Les auteurs recommandent que les États récompensent les agriculteurs adoptant des pratiques agricoles durables, et conseillent que les subventions publiques ainsi que le financement privé soient réorientés de l’agriculture conventionnelle vers une agriculture plus durable, ce qui aiderait également à atteindre les objectifs de santé publique. Enfin, le rapport souligne comment l’agriculture durable peut contribuer à la conservation de la biodiversité dans le monde entier, et encourage un meilleur dialogue entre agriculture et secteurs de la conservation, afin de sensibiliser plus largement au capital naturel que constituent les sols riches en biodiversité pour l’agriculture.
Le rapport complet (en Anglais) est disponible ici.
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