Communiqué de presse | 17 Nov, 2014

L’appétit mondial pour les ressources pousse de nouvelles espèces vers l’extinction – La Liste rouge de l’UICN

Le thon rouge du Pacifique, le fugu chinois, l’anguille d’Amérique, le cobra chinois et un papillon australien sont menacés d’extinction

Pour satisfaire notre appétit insatiable de ressources, la pêche, l’exploitation du bois, les activités minières et l’agriculture, entre autres, menacent la survie du thon rouge du Pacifique, du fugu chinois, de l’anguille d’Amérique et du cobra chinois tandis que déjà, la destruction de l’habitat a causé l’extinction d’un mollusque malaisien et du plus grand perce-oreille connu au monde et menace la survie de beaucoup d’autres espèces – selon la Liste rouge de l’UICN des espèces menacées™ qui vient d’être mise à jour et qui a été présentée aujourd’hui au Congrès mondial sur les parcs de l’UICN, à Sydney, en Australie.
 

 La Liste rouge de l’UICN, qui célèbre cette année son 50e anniversaire, comprend maintenant 76 199 espèces évaluées, dont 22 413 sont menacées d’extinction. Comme près de la moitié des nouvelles espèces évaluées se trouvent dans des aires protégées, l’UICN appelle à une meilleure gestion de ces sites pour empêcher tout nouveau déclin de la biodiversité.

« À chaque mise à jour de la Liste rouge de l’UICN, force est de constater que notre planète continue de perdre la diversité incroyable de la vie qu’elle porte, essentiellement à cause de nos actions destructrices pour satisfaire notre appétit insatiable pour les ressources » déclare Julia Marton-Lefèvre, Directrice générale de l’UICN. « Mais nous avons des preuves scientifiques attestant que les aires protégées peuvent jouer un rôle vital dans le renversement de cette tendance. Les experts affirment que les espèces protégées mal représentées dans les aires protégées déclinent deux fois plus vite que celles qui y sont bien représentées. Nous avons le devoir d’augmenter le nombre d’aires protégées et de veiller à leur gestion efficace pour qu’elles puissent aider à sauver la biodiversité de notre planète. »

Dans la nouvelle Liste, le thon rouge du Pacifique (Thunnus orientalis) est passé de la catégorie Préoccupation mineure à Vulnérable, ce qui signifie qu’il est désormais menacé d’extinction. L’espèce fait l’objet d’une pêche intensive pour le marché des sushis et des sashimis, surtout en Asie. La plupart des poissons capturés sont des juvéniles qui n’ont pas encore eu le temps de se reproduire et l’on estime que la population a subit un déclin de 19 à 33% depuis 22 ans.

Les aires marines protégées n’assurent pas une protection suffisante à l’espèce. Les experts de l’UICN estiment que des aires marines protégées dans les 200 milles à partir du littoral et intégrant les zones de reproduction pourraient contribuer à la conservation de l’espèce.

« La valeur marchande du thon rouge du Pacifique ne cesse d’augmenter » déclare Bruce Collette, Président du Groupe de spécialistes des thonidés et istiophoridés de la Commission de la sauvegarde des espèces de l’UICN. « Tant que les pêcheries n’appliqueront pas les mesures de conservation et de gestion élaborées pour l’océan Pacifique occidental et central, notamment la réduction des captures de juvéniles, nous ne pourrons nous attendre à ce que l’état de ce poisson s’améliore à court terme. »

Le fugu (Takifugu chinensis), un poisson-globe chinois, a fait son entrée sur la Liste rouge de l’UICN, dans la catégorie En danger critique. On estime que sa population mondiale a diminué de 99,99% depuis 40 ans en raison de la surexploitation. Mets populaire au Japon, il fait partie des quatre principales espèces de fugu consommées en sashimis. Le fugu est un des poissons les plus toxiques du monde et doit être préparé de façon experte avant d’être consommé. Le fugu chinois est présent dans plusieurs aires marines protégées le long du littoral de la Chine. Des mesures de conservation, telles que la création d’aires marines protégées soumises à une fermeture annuelle de la pêche au chalut, ont été mises en œuvre. Toutefois, selon les experts de l’UICN, le prélèvement doit être contrôlé de toute urgence pour empêcher l’extinction de l’espèce.

L’anguille d’Amérique (Anguilla rostrata), inscrite dans la catégorie En danger, est menacée par les obstacles à sa migration ; le changement climatique ; des parasites ; la pollution ; la perte de l’habitat et le prélèvement à des fins commerciales. Compte tenu du déclin de l’anguille du Japon (Anguilla japonica), également inscrite dans la catégorie En danger, les élevages industriels intensifs d’anguilles, en Asie de l’Est, tentent de reconstituer les stocks d’ensemencement avec d’autres espèces, telles que l’anguille d’Amérique. En conséquence, les rapports sur le braconnage de l’anguille d’Amérique aux États Unis se sont multipliés. Toutes ces menaces se conjuguent pour exercer des pressions sur l’espèce mais des mesures de conservation dynamiques pourraient améliorer son état.

Le cobra chinois (Naja atra) vient d’être évalué et placé dans la catégorie Vulnérable. Sa population a décliné de 30 à 50% depuis 20 ans. On trouve le cobra chinois dans le sud-est de la Chine, à Taiwan, dans le nord du Viet Nam et en RDP lao, et il figure parmi les principales espèces animales exportées de Chine continentale vers Hong Kong pour le marché alimentaire. Le cobra chinois est présent dans des aires protégées telles que la Réserve naturelle d’Ailaoshan, la Réserve naturelle de Daweishan (Yunnan) et le Parc national Kenting (Taiwan). Bien que le commerce international de l’espèce soit réglementé, il est urgent de renforcer les initiatives nationales de conservation pour garantir sa survie.

« Le marché alimentaire en pleine expansion exerce des pressions non durables sur cette espèce, parmi d’autres » déclare Jane Smart, Directrice du Groupe mondial pour la biodiversité de l’UICN. « Il faut, sans délai, imposer des limites strictes sur le prélèvement et prendre les mesures appropriées pour protéger les habitats. »

La mise à jour de la Liste rouge met également en vedette plusieurs espèces touchées par la destruction de leur habitat, notamment les 66 espèces de caméléons menacées, bien que certaines soient présentes dans des aires protégées. Le caméléon Kinyongia matschiei, endémique des monts Usambara orientaux de Tanzanie, est classé dans la catégorie En danger. Comme beaucoup d’autres caméléons, cette espèce utilise la couleur pour communiquer. Il s’obscurcit également lorsqu’il est stressé et enroule sa queue autour des branches pour se sécuriser. Présent dans la Réserve naturelle Amani, une aire protégée, ce reptile est menacé par le déboisement pour l’agriculture, la production de charbon de bois et l’exploitation de bois d’œuvre.

Le papillon Ocybadistes knightorum a fait son entrée sur la Liste rouge dans la catégorie En danger. Uniquement présent dans la région côtière du nord de la Nouvelle-Galles du Sud en Australie, l’espèce est principalement menacée par des plantes adventices envahissantes introduites et le développement côtier qui détruit son habitat. Une part importante de cet habitat se trouve dans des aires protégées telles que le Parc national Bongil Bongil et le Parc national Gaagal Wonggan (South Beach), et la gestion efficace de ces régions pourrait être déterminante pour l’avenir de l’espèce. La menace que représentent les plantes adventices envahissantes est gérée dans certaines réserves où des parcelles clés ont bien répondu au désherbage, préfigurant une restauration réussie de l’habitat.

Deux espèces ont été déclarées Éteintes à cause de la destruction de leur habitat. Plectostoma sciaphilum, un escargot connu sur une seule colline calcaire de la péninsule Malaise, est maintenant Éteint, la colline ayant été entièrement détruite par l’exploitation d’une carrière de calcaire par une grande entreprise. L’avenir de plusieurs autres espèces de la région est incertain pour des raisons semblables. Certaines compagnies minières commencent à prendre les mesures nécessaires pour réduire leur impact, mais l’UICN exhorte à s’engager plus fermement pour éviter de nouvelles extinctions.

Le perce-oreille géant de Ste-Hélène (Labidura herculeana) – la plus grande espèce connue de perce oreilles au monde, pouvant mesurer jusqu’à 80 mm de long – est également éteint. Autrefois présent à Horse Point Plain, une aire protégée de l’île de Ste Hélène, la dernière observation confirmée d’un adulte vivant date de mai 1967. Depuis le début des années 1960, son habitat a été dégradé par l’élimination, pour la construction, de presque toutes les pierres de surface qui lui assuraient un abri. Les pressions accrues des prédateurs, souris, rats et invertébrés prédateurs envahissants, ont aussi contribué à l’extinction de ce perce oreille.

« Ces extinctions récentes auraient pu être évitées par une meilleure protection de l’habitat » déplore Simon Stuart, Président de la Commission de la sauvegarde des espèces de l’UICN. « La mise à jour d’aujourd’hui met également en vedette deux espèces d’amphibiens dont l’état s’est amélioré grâce à la bonne gestion de la Réserve Ranita Dorada où on les trouve, en Colombie. Nous devons nous montrer plus responsables de nos actes si nous voulons voir davantage de succès comme celui ci et avoir un effet positif sur la santé de notre planète.

Pour plus d’information ou des entretiens, veuillez contacter :
Ewa Magiera, Relations avec la presse UICN, m +61 (0) 43 40 25 278, e ewa.magiera@iucn.org  
Lynne Labanne, Programme mondial pour les espèces UICN, t +41 22 999 0153, m +41 79 527 7221, e lynne.labanne@iucn.org